Quand les montagnes blanches se présentent, sans daigner même courber leurs vallons pour nous saluer, mais nous obligeant plutôt à lever les yeux pour nous faire toiser, il est de bon augure de songer que nous ne serons pas à même de les gravir seuls.
Empoignant comme un argument sans faille cette défaillante condition humaine, nous forgeons notre équipe avec soin, s’entourant d’épaules plus rigoureuses, sur qui nous pourrons épancher notre épuisement.
C’est ainsi qu’est apparu « Goré », son mètre soixante, ses braves yeux d’homme attentionné, et ses cinquante années d’expérience passées à courir le yak dans son village.
A se fier à cette ridicule anatomie de grimpeur, il était plutôt clair que son ascension, alourdie qui plus est par des kilos de charge que je n’ose comptabiliser, se ferait dans une souffrance, rendue discrète et silencieuse, par les mètres d’avance que je mettrai aisément entre nos pas.
Mais Goré est de ce genre d’homme dont la ressource n’a rien à voir avoir l’apparence, dont la force se dissimule sous le joug de mollets si fins que j’en aurai presque envié les miens.
Mon cher Goré dont on m’avait donc prévenu qu’il marcherait à son rythme, et qui court en fait au mien avec une aisance remarquable… Où se cache donc l’air de ses poumons dans un si petit corps, moi qui agonise entre deux pierres en portant mes deux litres d’eau, lui qui avale la montagne, le dos courbé et le sourire aux lèvres ?
Il mange son Dahl Bath tous les soirs, ce plat typique qui mêle le riz aux légumes et à la soupe de lentilles, qui s’avale avec les doigts, et redonne toutes les forces étiolées dans l’altitude.
Goré, pour qui les soirs doivent sembler fades et si légers, dépourvu de sa charge quotidienne et de cet effort qui n’a plus rien d’humain.
Demain je partirai avant lui.
Et demain, il passera devant moi sans souffler un mot, il m’attendra au col et trouvera sans la feindre, la force de me féliciter pour ma brillante ascension.
Les genoux tremblants, et l’air me manquant, je pourrai presque le croire, ce petit bout d’homme qui se joue du Népal.
waouh de la Birmanie dans ma boite aux lettres!! un très grand plaisir..merci merci merci
ta description de Goré bouscule ma mémoire défaillante, moi il s’appelait Babou..
profite de ces beaux moments jusqu’au bout mais rassure toi il y en aura d’autres j’en suis certaine
contente de savoir que la Birmanie est arrivée à bon port !
Je profite, je profite jusqu’au bout !!
j’ai emboîté ton pas , j’ai grimpé aussi, le rythme lent , le pas certes plus hésitant , moins assuré ; ma tête tournait ,le souffle m’a manqué , j’ai souvent eu peur mais j’ai résisté et je t’ai suivie sans te lâcher depuis mon confortable canapé…
l’aventure a été merveilleuse!!
merci une fois de plus ma chérie…
Mum
Si j’ai réussi à faire voyager le canapé c’est un beau pari !
Merci d’avoir et de toujours suivre la route !
Bisous depuis Katmandou !
Goré, comme l’île éponyme, semble infranchissable. Un très bon compagnon de route également semble t-il. Profite de l’Himalaya, un salut à ces géants que je rejoindrai pour sûr un jour. Prend soin de toi et couvre toi!! Continue de t’emerveiller, et de nous le faire partager