Voyages en sac à dos

Une Chine oubliée

Les sommets abrupts attaquent le paysage, enserrant cette province dans les griffes de ces roches alors que la rivière Li, imperturbable, y poursuit sereinement son éternelle ronde.
Voici les deux gardiens de Yangshuo : Les hauteurs de la terre et la course de l’eau.
La vie que l’on y mène se fixe à ces repères, aux robustes racines qui poussent d’un sol fertile et aux radeaux de Bambou qui défient les profondeurs modestes des eaux.
Quelques coups de pédales pour traverser alentours ces paysages polis par la fraicheur de l’air.
A la croisée des chemins, de bien pauvres et sommaires tréteaux, gardés pas de vieilles générations paysannes dont les mains portent les traces d’une besogne quotidienne, proposent quelques pièces de viande et trois feuilles de verdure.
On en sourit par incrédulité, comme si ce mode de vie n’existait que pour un monde qui nous est inaccessible.
Les villageois s’arrêtent et soupèsent leur marchandise avec une balance manuelle dont seule la précision n’a pas pris le temps de rouiller. Alors que du panier de leur bicyclette s’échappent des mets inconnus, leurs silhouettes s’effacent dans l’horizon pour rejoindre des maisons gelées où les heures passent au rythme des jeux de carte et de la vie des troupeaux.
Certains, bien avenants, poussés par la curiosité que nos yeux différents et notre peau trop blanche attise, nous assaillent de longs monologues que l’on aimerait pouvoir comprendre. Le chinois se perd entre leurs lèvres et ces vallons, il résonne dans l’air comme une partie du décor, comme un mystère de plus que l’on ne peut posséder.

Dans un des parcs du petit centre de la ville toute proche, les heures matinales sont propices à la pratique du « Taï Chi », art martial de défense et d’équilibre, où le corps et l’esprit collectent et partagent la même énergie selon le principe du Yin et du Yang.
Les mouvements sont souples et fluides sans être lents ni désordonnés.De la nature se puise toute la force nécessaire à l’harmonie. Entourés de ces hautes montagnes sombres depuis lesquelles nos corps semblent insignifiants, cet enseignement prend alors toute sa dimension.
Si les premiers gestes sont hésitants, l’étonnante et rapide sérénité que l’on en retire nous incite à poursuivre l’exercice sous les précieux conseils de maître Yuan. Par chance ou peut être par talent, la patiente est l’une de ses plus remarquables vertus…

La Chine a la puissance des traditions, la force des croyances et l’élégance de la pratique.
C’est bien ici, dans les recoins de ses campagnes profondes que l’hiver rend hostiles, que ces symboles transparaissent.
Nous sommes loin de l’excès ou du paraître, nous sommes à l’endroit même où le temps s’est figé pour que les hommes le capturent, juste à coté de cette rivière qui bien docile dans son lit, n’ose pas même s’agiter…

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4 Commentaires

  1. guydimeg guydimeg
    07/02/2015    

    Marine, je suis littéralement « scotché » par le choix et la précision des mots, par l’élégance des phrases pour nous faire partager tes émotions , le dernier chapitre de cet article est pour moi un monument du genre, tu as toute mon admiration
    Je t’embrasse

    • Marine Marine
      08/02/2015    

      Je ne sais dire que merci en Chinois. Xié Xié.
      Pourtant j’aimerai t’en dire plus.
      Merci beaucoup pour ce commentaire qui me touche énormément.
      J’imagine que le voyage embellit tout, même les mots.

      Merci encore, merci beaucoup.
      Je t’embrasse, et te dit à très vite pour la prochaine étape

  2. Anne.K Anne.K
    07/02/2015    

    Quel plaisir de continuer à vous suivre….., à vous lire !!!! Merci Marine et bon anniversaire avec quelques jours de décalage horaire. Bizzzzzzz

    • Marine Marine
      08/02/2015    

      Merci beaucoup madame K. !
      Vous êtes presque pile dedans avec le décalage !!

      Je suis heureuse que vous suiviez toujours le voyage, j’espère que vous appréciez toujours la lecture.

      A très vite et merci encore

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