Voyages en sac à dos

Au coeur des terasses de Longji

Si j’étais un enfant du village Tao je pourrais vous dire que mes jardins sont des pièces d’art. Ce sont mes pères qui les ont sculptés de leurs mains alors que je pensais que la nature seule pouvait créer pareille merveille.
Les sommets se découpent en étroites terrasses sur lesquelles s’épanouissent les pousses de riz. Ces escaliers de verdure qui se perdent dans mon regard portent chaque saison différents costumes que je ne saurai décrire sans outrance.
En janvier, elles se gorgent d’une eau qui devient miroir sur lequel le ciel pleure toutes ses nuances. Les algues qui s’y oublient égayent l’ouvrage de couleurs étonnantes.
Mais l’hiver n’est pas notre meilleur allié, nos maisons de bois sont froides et notre feu timide, il m’oblige à porter des couches de laines qui peinent encore à me protéger de ses courants d’air.
J’imagine combien pour vous l’ascension s’avère rude et décourageante parce que je connais bien l’agilité de nos vieilles générations, qui gravissent du haut de toutes leurs années de labeur, ces chemins escarpés et bien souvent trop raides.
Leurs pas sont prestes quand les vôtres sont lourds, bien que leurs dos soient chargés et les vôtres bien nus.
Ici vous ne côtoierez que la rigueur d’une vie simple, où les pousses de bambous sont des armes utiles pour affiner la cuisson du riz, où les carrés de tofu fument sous leur linge si fraichement découpés, et où chaque parole s’économise comme dernière source de chaleur.
Notre dialecte vous étonnera peut être, il n’a pas le même éclat que le chinois des grands villes, mais nos simples ruelles irrégulières qui suivent les courbes de nos vallées n’ont guère besoin de leur faire concurrence.

Je crois bien que je vous envie.
Je suis un enfant du village Tao et je connais ces sentiers, ces rizières et ces coutumes. Tant et si bien que mes yeux oublient de les regarder, devenues pièces transparentes d’un quotidien qui usait déjà mes ancêtres.
Votre regard neuf, habillé d’émotion pour sa toute première visite, ne prendra pas le temps de se lasser des vues qui le combleront.
Chanceux celui qui s’immerge chez nous, pour qui la découverte, parce qu’elle est furtive et singulière , ne peut être que remarquable.

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8 Commentaires

  1. moi moi
    10/02/2015    

    je reviens du cap vert et tes émotions vécues me semblent familières , tu arrives si bien à les transposer en mots…
    mon guide Alcindo me disait « faut s’en profiter »
    alors je te dis les mêmes mots
    prends soin de toi bises

    • Marine Marine
      13/02/2015    

      Cap vert.. encore un bel endroit à ajouter à ma longue liste !
      Merci de me suivre, encore et toujours.

      « je m’en profite un maximum ». Alcindo serait fier de moi..

  2. Bopha Bopha
    10/02/2015    

    Un rêve éveillé…Tout y semble si magnifique et paisible …

    • Marine Marine
      13/02/2015    

      Ordre et beauté, luxe, calme et volupté…
      Effectivement, ça m’avait tout l’air d’un rêve…

  3. MP MP
    11/02/2015    

    coucou Marine,non je ne t’aie pas oublier j’etais perdue dans mon quotidien et la j’ai vraiment envie de m’evader alors bien entendue je te lis Marine et l’effet est magique car je suis tour a tour dans tous ces endroits a la fois et c’est tellement beau et enivrant que je lis et relis pour ne pas sortir de ce voyage ,alors a bientot car j’adore m’elever a chaque fois un peu plus haut.Big kiss

    • Marine Marine
      13/02/2015    

      Ma chère MP, je savais bien que tu n’étais pas loin..!
      Je suis heureuse de te permettre de t’évader un peu du quotidien le temps de quelques lignes, elles sont essentiellement faites pour ça..
      A très bientôt donc, parce que la route est encore longue et les récits seront donc encore nombreux !!

      Merci encore MP
      je t’embrasse.

  4. guydimeg guydimeg
    11/02/2015    

    le texte interpelle et laisse grande ouverte la porte à l’imagination, mais les photos dévoilent une nature inimaginable sculptée et façonnée par des mains certes humbles et laborieuses, mais expertes en harmonie des courbes et autres sinusoïdes .
    On t’envie un peu, Marine,de pouvoir contempler telle merveille, gigantesque palette de peintre, mais l’on ne peut que te remercier de nous l’offrir ainsi.
    Big bisous

    • Marine Marine
      13/02/2015    

      Un peu d’originalité dans le style, c’est tout ce que m’a inspiré cet endroit lorsque j’y randonnais : l’improbable.
      Alors tu as raison, je pense que le texte interpelle, et je suis heureuse de savoir qu’il décuple l’imagination…
      Les paysages étaient tout simplement fascinants.

      A très vite
      bisous

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Mais les vrais voyageurs sont ceux-là seuls qui partent
Pour partir ; cœurs légers, semblables aux ballons,
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Et sans savoir pourquoi, disent toujours : Allons !

Charles Baudelaire