Voyages en sac à dos

Vivre un jour à Hong Kong

Il est huit heures et les rues sont encore froides, éphémère répit qui ne promet qu’une effervescence décuplée.
Les grandes enseignes sont  closes, leurs rideaux de fer s’amusent du contraste avec les petites échoppes de rues d’où s’échappent déjà les odeurs de l’Asie. On avale quelques beignets vapeurs, arrosant les premières heures de la journée avec le parfum des feuilles de thé vert.
Le pavé est resté sale du passage de la nuit, mais il est un décor que l’on apprécie paradoxalement pour ce qu’il signifie : Hong Kong vibre et son ébullition se déverse dans les rues.

Il est dix heures et le spectacle commence. Les pas se font plus vifs, les corps se bousculent dans les rames étroites du métro, les mains se serrent, les cris s’échangent, les stands se colorent, et Hong Kong est noircit par la foule. On parle anglais, cantonais, mandarin, les yeux sont bridés ou les cheveux blonds, en un instant la ville nous absorbe, âme perdue parmi sept millions d’autres. Immersion anonyme dans l’étreinte de cette péninsule, compacte et enivrante.

Il est midi comme il pourrait être quatorze ou quinze heures, rien ne semble stopper la course ni l’affluence. Hong Kong pourchasse le temps et l’espace, et parfois à bien y regarder, elle parait presque y parvenir.
Le quotidien, s’il existe, doit sûrement se cacher bien haut, perché dans les étages de ces immeubles imperturbables qui seuls profitent de la lumière. A leur pieds, insignifiant, nous n’accédons qu’à l’artifice de l’architecture.

Il est seize heures et l’on a besoin d’air et d’espace.
L’ascension se mérite jusqu’au « temple des dix mille bouddhas », les statues dorées guident nos pas jusqu’aux hauteurs de sa colline et la ville se dévoile sous un angle insoupçonné.
Elle parait presque paisible, admirée depuis la quiétude de ce lieu, loin de sa cohue.

Il est vingt heures et la faim se calme au bord d’une table de bois, à même le trottoir.
Des fritures de langues de canard au poulet citron, l’assiette elle même renvoie l’écho des lieux : couleurs et mixité, finesse et improbable.
Le service est un va et vient incompréhensible sur toutes les largeurs de la rue.

Il est vingt deux heures et les stands de nuits sont légions.
Le marchandage est la seule monnaie courante dans les lacets obscurs de la ville.
Touristes ou locaux, il n’y a pas une paire d’yeux qui puisse éviter l’expérience, partout Hong Kong s’agite et n’est pas prête de dormir.

Au large de la baie à la même heure, le ferry pour Macau accoste. Une île luxueuse qui absorbe les dollars dans les casinos. Et par cette opulence , un brin de calme s’immisce dans les rues. Le style de leurs pierres est Européen, l’on perd un peu du vertige qui nous a brouillé l’esprit sans oublier qu’il n’est jamais loin, sur cette ligne d’horizon qui brille dans la nuit.

On ne sait plus bien l’heure exacte mais Hong Kong nous a exténués. Il y a tant à voir et à y faire qu’elle même n’en dort plus.
Fermons les yeux pour cette nuit, demain, il sera huit heures à nouveau, et le spectacle promet d’être le même et pourtant toujours singulier.

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1 Commentaire

  1. guydimeg guydimeg
    15/02/2015    

    Quelle assurance : défier ainsi le boudha du regard ! Hong Kong la tentaculaire et grouillante megalopole n’a apparemment pas réussi à te déstabiliser ! On attend la suite de cet étonnant périple
    Bises

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Mais les vrais voyageurs sont ceux-là seuls qui partent
Pour partir ; cœurs légers, semblables aux ballons,
De leur fatalité jamais ils ne s’écartent,
Et sans savoir pourquoi, disent toujours : Allons !

Charles Baudelaire