Voyages en sac à dos

Dans le désert de Gobi

Dans un pays de verdure, où les plaines n’offrent que leur tenue trop plate aux troupeaux qui s’en amusent, se cachent, dans les recoins d’un Sud bouillant, abruti de soleil, les terres craquelées du désert de Gobi.

L’univers se transforme, l’horizon se sèche au rythme des rails du transmongolien, les tasses de thé fument devant les fenêtres vieillies des wagons lits, et le pays se délasse de ses couleurs.
Autour de nous ne s’étend plus qu’une terre brune et assoiffée, où les rares percées végétales sont un point de vie qui s’éteignent trop vite dans le flou de notre avancée pourtant nonchalante.
Nous traversons quelques gares, vieux bâtiments fantomatiques qui peinent à briser la monotonie de ce vide net et étouffant.  L’arrêt ne dure que quelques minutes, l’espace paraît infini depuis notre couchette, pointillé grouillant qui file dans l’immobilité du panorama.

Et puis brutalement, la course s’arrête au milieu du néant, ville minimaliste qui se prélasse dans l’intemporalité, la porte d’entrée du désert est silencieuse.

Plantées plus loin dans le décor, nos yourtes se perdent dans la lumière jaune, un microcosme étonnant de bétail et d’éleveurs, qui repoussent sans y paraître les limites du confort.

La famille Mongole vit de ses chèvres, chameaux, chevaux, rit de nos égards et s’éclipse trop vite dans sa froide discrétion. Comme un barrage infranchissable, fait de culture et traditions, nos partages sont restreints. Il y a bien le lait de chamelle fermenté que l’on veut nous faire goûter, le fromage de yak séché qui s’impatiente de notre impression, mais ils sont autant de heurts que nous acceptons par délicatesse et nous empressons d’oublier.

Enfants sages de peu de moyens, la vie des plus jeunes regorge de richesses invisibles. L’émerveillement, la candeur, l’oubli de l’inclémence de leur monde, sont autant de vertus que le Gobi semble préserver.

Dans leur infini jardin, il y a des serpents derrière les broussailles et de vieilles carcasses de bêtes.

A peine le temps de tenir sur deux jambes, que c’est une selle qu’il faut dompter, les rênes qu’ils dirigent sont leur allié dans cette splendeur hostile.

Les journées sont vastes et lentes, rien ici ne semble presser le geste. Les heures trop chaudes obligent à cette langueur, seule la traite matinale ne souffre d’aucune entrave quand les après midi sont une simple quête de l’ombre à l’immobilité.

Le désert étouffe sans air, rien ne circule dans l’embonpoint de notre yourte sinon les hurlements des loups qui se partagent la nuit.

Un ciel clair renvoie l’écho d’un sol qui oublie de se refroidir et les étoiles épient notre sommeil, confus de se consommer distancé par le monde et pourtant en plein dans son antre.

Nos voisins sont si loin qu’ils en deviennent imaginaires, nous sommes seuls dans un désert sans frontière, qui ne connaît des hommes que les insignifiants toits blancs qu’ils montent et démontent comme un simple bagage, condamnés à l’errance par leur propre Terre.

 

 

 

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1 Commentaire

  1. Bopha Bopha
    02/09/2015    

    Into the wild forever !

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Mais les vrais voyageurs sont ceux-là seuls qui partent
Pour partir ; cœurs légers, semblables aux ballons,
De leur fatalité jamais ils ne s’écartent,
Et sans savoir pourquoi, disent toujours : Allons !

Charles Baudelaire